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Pierre Duquesne : Les relations entre l’Union pour la Méditerranée et le Maroc sont excellentes

31.12.2019 | La Méditerranée a toujours été  au cœur de la politique étrangère de la France. On parle de l’Union pour la Méditerranée et d’autres institutions de coopération dans la région. C’est devenu presque un rêve irréalisable  pour la France?

 

 

Honnêtement, je ne suis pas  sûr que ce soit uniquement un rêve français, c’est un rêve  de tous  les pays riverains de la Méditerranée et des pays du Sud de  l’Europe. On a organisé le sommet des 2 Rives au mois de  juin dernier à Marseille. On l’a fait dans un format «5 + 5» qui date de 1990, et après il y a eu  le processus de  Barcelone de 1995 et l’Union pour la Méditerranée en 2008.
Dans ce format-là, il y a un vrai travail collectif au Nord comme au Sud de la Méditerranée pour travailler ensemble. Quand le Président de la République française a lancé  cette idée, il y a eu un bon accueil. Un dispositif très compliqué  consistait à donner le pouvoir à la société civile. Et ça pouvait ici ou là poser question.
En ce qui concerne les pays riverains, il n’y avait pas de doute, il y avait une  envie de faire. En ce qui concerne les pays  d’Europe non riverains, la situation était différente. Globalement, tous avaient envie de parler de la Méditerranée surtout depuis l’apparition du problème migratoire.  D’une part, les problèmes migratoires leur ont fait comprendre que cette zone n’était pas une frontière étanche  et d’autre part, ils ont intérêt, même s’ils sont loin au Nord, de travailler avec les pays de l’Afrique du Nord et de l’Afrique subsaharienne. C’est le cas notamment de l’Allemagne.
Normalement, dans le sommet des deux Rives, il n’y a pas l’Allemagne mais nous y avons pensé. En plus de l’Union européenne, des institutions internationales et  autres organisations économiques internationales.
La Méditerranée, ce n’est pas seulement un rêve français. Premièrement, avec la crise migratoire de 2015, il y a eu une prise de conscience de ce qui se passe au Sud de la Méditerranée. Cela a été très important pour nous, même pour les pays du Nord de l’Europe et deuxièmement parce que les gens n’ont pas envie de parler uniquement de la migration.

Si on fait l’historique de ces  différents sommets sur la Méditerranée depuis le  processus de Barcelone avec Jacques Chirac, l’Union pour la Méditerranée avec Nicolas Sarkozy et le Sommet des 2 Rives avec Emmanuel  Macron, ce sont toujours des présidents français qui portent ce  projet  vers les autres pays européens.
En Europe, on est sur divers sujets,  on a été une force de propositions. Parfois, ça a marché  et parfois non. Si  vous prenez un projet auquel j’ai le plaisir de participer, à savoir le projet de l’Union communautaire  de la monnaie unique, il a été initié par les français. C’est un peu le tempérament national. Vous avez raison de  citer Chirac et Sarkozy, le président Hollande a été un peu prudent sur ce sujet, il n’a pas tellement parlé de la Méditerranée sauf quand il y avait la crise migratoire. En revanche,  le président  Macron en a parlé dans la perspective de changer la méthode. La différence est fondamentale, on n‘est plus uniquement dans l’intergouvernemental, il y a aussi cet mécanisme très compliqué  au sein duquel on a donné le pouvoir à 100 personnalités qualifiées.

C’est  donner l’initiative à la société civile ?
Oui au sens large du terme, ce sont les ONG, les entreprises, les chercheurs et différents acteurs en plus des collectivités locales.

Quel est le bilan de cette initiative ?
Le sommet qui s’est tenu il y a 5 mois à Marseille s’est bien déroulé. De nombreuses  initiatives ont vu le jour à tous les niveaux. Nous sommes en train  de mettre en forme tout cela, de voir ceux qui peuvent  prospérer, de tenter de mettre en contact les  porteurs de projets avec les organismes financiers. L’un des projets qui prospère assez bien est porté par  Emerging Valley et s’appelle Emerging méditerranéen. Il propose de mettre en réseau les incubateurs de start-up dans la zone méditerranéenne.
Vous avez, d’un côté, les ONG qui travaillent avec l’intergouvernemental et qui sont habituées  à présenter des projets conformes aux attentes des Etats. Et de l’autre, il y a des jeunes qui manquent d’expérience. Ils  ont lancé des initiatives et  il faut mettre tout cela en forme.
Dans ce projet-là,   la  France n’est pas toute seule, il faut qu’elle le fasse  d’une  manière  inclusive. Le but du président de la République est d’être  moins prospectif. Cela  prend du temps.

Le Maroc  a toujours été  un partenaire de la France en matière de  politique méditerranéenne.  Comment qualifiez- vous cette relation ?
Elle  est excellente. Nous avons  bien travaillé avec le Maroc. Mais ce que je trouve formidable, c’est que dans ce sommet à dix, on ne travaille pas au niveau bilatéral mais plutôt à dix, ce n’est pas évident et on y arrive. Les relations bilatérales avec le Maroc sont excellentes,  mais dans ce format (5+5), on est dans le multilatéralisme. Tous les pays doivent mettre leur drapeau national de côté. La France et le Maroc n’ont pas besoin de ce format pour se rencontrer, mais le Maroc, la Tunisie, l’Italie, l’Espagne ont besoin  de  cela. Le passage du bilatéralisme  au multilatéralisme  est aussi à définir.

Source : https://www.libe.ma/Pierre-Duquesne-Les-relations-entre-l-Union-pour-la-Mediterranee-et-le-Maroc-sont-excellentes_a114310.html

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Tags : Coopération internationale Libération UE/Etats membres